Cou coupé court toujours
Béatrix Beck & Mélanie Delattre-Vogt


Cou coupé court toujours


– Entrez entrez, crie la septuagénaire. Je suis nue comme le petit Jésus mais ça ne fait rien.
Le plombier entre. A tous les étages la radio annonce le retour des chalutiers Nini et Notre-Dame. Les femmes courent au port prendre la paie avant qu’elle ne soit bue.

Cou coupé court toujours pourrait n’être que l’histoire tristement banale d’Edmond Surnin qui, depuis que sa femme l’a quitté, tente de préserver tant bien que mal un reste de foyer avec ses deux filles. Mais il y a l’incroyable inventivité de Béatrix Beck, qui bouscule la forme romanesque traditionnelle, se joue des mots et du lecteur, faisant de la truculence et de l’irrévérence ses mots d’ordre.
Dans ce roman paru pour la première fois en 1967 et salué par la critique comme “un chef-d’œuvre de malignité, de tendresse et d’invention”, Béatrix Beck, dans la lignée d’un Queneau, fait feu de tout bois pour conjurer la dureté de l’existence et célébrer la puissance incantatoire de l’écriture.

Mélanie Delattre-Vogt s’empare de ces visions fantasques et délirantes et se plaît à incarner avec poésie et délicatesse l’orgie de mots réjouissante de Béatrix Beck.

A l'occasion de la parution de Cou coupé court toujours, les éditions du Chemin de fer publie un livret biographique de 40 pages, consacré à Béatrix Beck, avec de nombreuses photos inédites, une préface de Béatrice Szapiro, la petite-fille de Béatrix Beck, et une chronologie de Valérie Marin La Meslée.
Ce livret est offert, dans la limite des stocks disponibles, pour tout achat d'un des deux ouvrages de Béatrix Beck publié aux éditions du Chemin de fer.

Lisez les premières pages de Cou coupé court toujours en cliquant ICI



ISBN : 978-2-916130-34-7
Prix : 14 euros TTC
96 pages
Ouvrage publié avec le soutien du Conseil régional de Bourgogne

Cou coupé court toujours Béatrice Beck Mélanie Delattre Vogt

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Publié en 1967 par les éditions Gallimard, Cou coupé court toujours marque une rupture dans l'œuvre de Béatrix Beck. Tournant stylistique (absence de ponctuation, jeux de langage) et rupture thématique puisque ce roman rompt avec la démarche autobiographique : Barny, double autobiographique de l'écrivain (que l'on retrouvait depuis le premier livre Barny, jusqu'au Muet, en passant par Léon Morin prêtre), n'est plus présente dans le livre que sous le patronyme abrégé d'Aro (pour Aranovitch).
Il est bien difficile de résumer l'intrigue de Cou coupé court toujours, dont l'originalité et la modernité doivent énormément à la démarche cinématographique de la nouvelle vague. La trame du roman tourne autour du foyer d'Edmond Surnin, le père de famille, docker de profession, quitté par sa femme Germaine Thuillier, et qui s'occupe seul de ses deux filles Claude et Martine (à moins que ce ne soit ses filles qui s'occupent de lui). Les thèmes qui deviendront centraux dans l'œuvre de la deuxième période de Béatrix Beck (qui commence avec L'épouvante l'émerveillement, réédité en 2010 par Les éditions du Chemin de fer) sont déjà là : l'enfance trop tôt quittée, l'inceste, le langage et ses déformations, les torsions qu'on peut lui faire subir, l'amoralité, l'humour et la dérision et bien sûr les multiples narrations et narrateurs possibles d'un récit.
Gallimard, échaudé par les faibles ventes du livre, refusera ensuite les manuscrits de Béatrix Beck dont le livre suivant (L'épouvante l'émerveillement) ne paraîtra que dix ans plus tard, aux éditions du Sagittaire.

A propos de Cou coupé court toujours, Béatrix Beck écrira dans Confidences de Gargouille (Grasset, 1998) : "Pour la première fois dans ce livre, je m'éloignais de moi puisqu'il s'agit essentiellement de ce docker et de ses deux filles, nos voisins lorsque nous habitions Dieppe. L'écriture est très influencée par le cinéma. Je voyais ce livre comme une succession de séquences. J'y suis à peine présente. Mais c'est justement celui-là, Cou coupé court toujours, dont j'ai su qu'il avait été… je dis toujours tronçonné au lieu de pilonné."
et plus loin : "Martine, la fille du docker de Cou coupé court toujours, avait des responsabilités d'adulte, gérant le salaire familial alors qu'elle n'était encore qu'une enfant. Au sujet de ce livre, ma sœur m'avait écrit que tous ces êtres "inférieurs" lui donnaient envie de se pendre. Quelqu'un d'autre m'avait dit qu'il lui donnait envie de s'envoler. Moralement, ces enfants manifestent une âpreté précoce, une dureté extrême parfois".

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Enfin, à propos du titre mystérieux, un extrait d'une interview à Valérie Marin La Meslée pour le Magazine littéraire :
"En 1967, vous publiez Cou coupé court toujours, le premier de vos livres (les contes mis à part), qui ne soit plus strictement autobiographique, et qui marque un tournant dans votre écriture. D'où vient, au-delà de la référence poétique, cette image violente de décapitation, récurrente dans votre œuvre ?
Je crois avoir compris d'où vient l'idée. J'étais toute petite, nous vivions à Saint-Germain-en-Laye et ma mère, sans s'en rendre compte, cherchait à m'habiller de la façon la plus garçonnière possible, tout en achetant des choses de qualité malgré sa pauvreté. Un jour, dans un magasin, elle décide de m'acheter un chapeau en cuir à jugulaire, couleur limace. Et là, la vendeuse, avec des larmes dans la voix, dit à ma mère "comment voulez-vous mettre un chapeau à jugulaire à une enfant qui n'a pas de cou ?" Ça m'est resté.
C'est-à-dire ?
J'ai essayé de me défendre après, quoique n'ayant pas de cou. Cou coupé, j'existais quand même."


Fragments retrouvés dans une pochette intitulée « Reliquat Cou coupé » :


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L'auteur : Béatrix Beck
L'artiste : Mélanie Delattre Vogt

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